Un graphiste qui facture 300 € la journée et termine sa semaine avec 1 500 €, voilà un scénario classique. Sauf que ce même professionnel découvre vite que ses charges, l’incertitude client et les jours non facturés grignotent sa marge. La vraie question n’est pas « combien vaut une journée ? », mais « combien vaut le résultat que j’apporte ? ».
Fixer ses tarifs constitue l’un des défis majeurs de l’indépendant. Trop bas, on s’épuise sans rentabilité. Trop haut, on effraie le client. Pourtant, un positionnement tarifaire juste reste la clé de la pérennité. Explorons trois grandes approches, concrètes et éprouvées sur le terrain, pour choisir un modèle tarifaire cohérent et performant.
1. Le repère solide : le TJM
Le Taux Journalier Moyen (TJM) reste l’unité de mesure historique du freelance. C’est le montant facturé pour une journée de travail, en moyenne huit heures. Pour le déterminer avec sens, il faut partir de données tangibles :
- Les charges fixes : loyer, matériel, abonnements, logiciels, mutuelle.
- Les dépenses variables : déplacements, imprévus, formations.
- Une marge à intégrer pour sécuriser le revenu net.
Un exemple concret : si vos coûts mensuels représentent 2 000 €, et que vous visez un revenu avant impôt de 3 000 €, il faut générer 5 000 € de chiffre d’affaires mensuel. En travaillant 15 jours facturables, cela correspond à un TJM de 333 €. Simple et parlant.
Pour ajuster ce repère, les plateformes comme Malt ou Codeur.com permettent de comparer les prix du marché. À compétences égales, un développeur spécialisé en e‑commerce facture souvent 20 à 30 % de plus qu’un généraliste. Un vidéaste à Paris peut facturer 500 € quand son homologue à Lyon se positionne à 380 €. L’expérience, la spécialisation et la typologie de clients font toute la différence.
Le seul bémol du TJM : il enferme dans une logique de « vente du temps ». On vend des heures, pas un impact. À terme, c’est souvent frustrant : le seul levier de croissance reste d’augmenter la facture horaire ou de travailler plus. Ce n’est pas toujours durable.
2. Le forfait : clarté et maîtrise
Deuxième approche : la tarification au forfait. Elle consiste à proposer un prix global pour une mission complète, sans lien direct avec le nombre de jours. Ce modèle rassure souvent les clients, qui maîtrisent leur budget dès la signature. Un exemple typique : un monteur vidéo peut proposer 4 vidéos de 10 minutes pour un tarif fixe de 1 200 €.
Le secret ici, c’est la précision du devis. Il doit détailler les livrables, les délais, les révisions incluses, et toute étape susceptible de dépasser le cadre initial. Un devis clair évite les discussions sans fin.
Pour garder la cohérence, le forfait doit rester aligné sur le TJM de référence. Si votre TJM est de 400 € et qu’une mission nécessite environ 3 jours, un prix de 1 200 € à 1 400 € reste cohérent. Vous pouvez ajouter une marge selon la complexité, les délais, ou l’envergure du client.
La vigilance concerne surtout les « dérives » : les demandes de modifications non prévues ou les extensions de mission. La parade : formaliser toute nouveauté dans un avenant, même léger. Cela protège votre rentabilité sans casser la relation client.
Avantage clé : le forfait valorise le résultat. Vous livrez un package, pas du temps. Cela change la perception. Le client achète un livrable, et vous gagnez en autonomie.
3. La tarification fondée sur la valeur
La troisième approche, la plus stratégique, consiste à fixer le tarif selon la valeur perçue du résultat. Ici, on ne parle plus d’heures mais d’impact. Vous devenez un partenaire économique, pas seulement un prestataire. C’est la méthode des indépendants expérimentés qui connaissent l’environnement de leur client.
Un exemple parlant : un créateur vidéo monte une campagne destinée à générer 100 000 vues et environ 5 000 € de ventes. Pourquoi se limiter à 200 € ? Si la contribution au chiffre d’affaires est directe, un prix entre 800 € et 1 200 € reste légitime. De même, un développeur web qui conçoit un site e‑commerce générant 10 000 € mensuels peut viser un tarif représentant 10 à 20 % de cette valeur.
Cette approche demande une compréhension fine des objectifs et des données du client : taux de conversion, panier moyen, coût d’acquisition, croissance espérée. Vous devenez conseiller avant même d’être exécutant.
4. Trois étapes pour la mettre en œuvre
Cette méthode repose sur une démarche structurée en trois temps :
- Compréhension du contexte : échangez avec votre client sur ses objectifs concrets, l’impact attendu, et les bénéfices mesurables. Quels revenus vise‑t‑il ? Quelle valeur moyenne par client ?
- Évaluation de la valeur créée : estimez le gain potentiel. Si votre travail peut générer 5 000 €, vous pouvez fixer votre tarif entre 500 € et 1 500 €, selon le risque et votre niveau d’implication.
- Présentation du prix : positionnez votre offre comme un investissement. « 1 000 € pour gagner 5 000 € » parle davantage qu’« 8 heures de travail à 125 € ». Le client visualise directement la rentabilité.
Cette logique transforme profondément la relation commerciale. Vous cessez de justifier votre tarif par le temps passé ; vous le justifiez par la performance livrée. C’est plus stimulant, et plus rentable à long terme.
5. Quand appliquer chaque modèle
Il n’existe pas de formule universelle. Chaque phase de votre parcours de freelance appelle une logique différente :
- Au début, le TJM et le forfait facilitent le pilotage et la transparence.
- Lorsque vous maîtrisez mieux votre impact, la tarification à la valeur devient plus pertinente.
- Pour certaines missions récurrentes ou des clients historiques, une combinaison des trois reste souvent la meilleure stratégie.
Par exemple, un créateur web peut facturer le design d’un site au forfait, le suivi mensuel selon un TJM, et la refonte stratégique selon la valeur perçue. Trois leviers cohérents, activés au bon moment.
6. Éviter les pièges classiques
Trois erreurs reviennent souvent chez les indépendants débutants :
- Se comparer uniquement sur le prix : la valeur perçue ne dépend pas de la concurrence, mais de votre expertise et de l’impact livré.
- Oublier les jours non facturés : prospection, communication, comptabilité. Un TJM juste intègre ces jours invisibles.
- Manquer de cadre : sans devis précis, tout projet devient un puits sans fond.
Rester professionnel, c’est accorder autant d’attention à la rentabilité qu’à la qualité du rendu. Les deux vont ensemble.
7. Synthèse et conseils de terrain
Le TJM reste un repère. Le forfait apporte la clarté. La tarification à la valeur apporte la croissance. L’enjeu n’est pas de choisir, mais de connaître à quel moment activer le bon levier.
Pour progresser, suivez ces bonnes pratiques :
- Évaluez votre rentabilité réelle tous les trois mois.
- Consultez régulièrement les benchmarks (Malt, Codeur.com) pour rester dans la fourchette du marché.
- Analysez vos résultats clients pour bâtir des cas concrets de valeur créée.
- Présentez vos offres sous forme de solutions, pas de temps vendu.
En développant cette approche pragmatique, vous sécurisez votre position tout en donnant du sens à votre tarification. Vous ne vendez plus des heures, vous livrez un résultat mesurable. Et c’est là que l’indépendance devient durable.
Source : plateformes de référence Malt et Codeur.com, synthèse inspirée de l’expérience du créateur Sébastien (Les Makers).
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