Le lundi soir, il arrive à la place et se plante au milieu, à quelques dizaines de mètres du parc Gezi. Le parc, berceau de la contestation du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, est solidement gardé par des dizaines de policiers depuis l’opération coup de poing samedi soir des unités antiémeute qui l’ont vidé à coups de gaz lacrymogènes et de canons à eau de ses milliers de manifestants.
Cinq heures plus tard, l’homme est toujours là, tranquille, les mains dans les poches, un sac et des bouteilles d’eau à ses pieds. Il fixe l’immense portrait du fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Atatürk, accroché au sommet de l’ancien centre culturel.
Cet homme en question s’appelle Erdem Gunguz, chorégraphe stambouliote, il est aidé par ses amis en empêchant les centaines de personnes présentes de s’approcher de lui et ils le ravitaillent en eau.
Asma, une des jeunes femmes turque qui tente de repousser la foule dit: « Nous voulons le protéger de toute provocation. Il faut qu’il soit seul au milieu de la place, sinon la police prétextera un rassemblement pour disperser tout le monde ».
Progressivement, une chaîne humaine forme un immense cercle autour de lui. Les appels à quitter la place se multiplient. Des jeunes se disputent, en désaccord sur la stratégie à adopter.
L’objectif de cet homme est de rester debout un mois en alternant 24 heures d’immobilité puis trois heures de repos, remplacé par un de ses amis. Son action a fait des émules: une poignée de jeunes se tiennent debout à ses côtés et fixent Atatürk.
Mais rapidement, la police décide d’intervenir. Des dizaines de policiers affluent sur la place. « L’homme à l’arrêt » a le temps de partir, entouré de dizaines de personnes. D’autres ont moins de chance. Une dizaine de jeunes manifestants sont interpellés par la police sous les objectifs des photographes et mis dans un bus de la police.
